Retour Home >>>
 
 La plus belle ville du monde...



Photos de base jump
© allezbase.com
Tous droits réservés

Alpes du Nord
206 photos

Alpes du Sud
111 photos

Suisse
85 photos

Italie
70 photos

Maroc
98 photos

Espagne
108 photos

Norvège
24 photos

Canada
167 photos

USA
44 photos

Mexique
19 photos

Venezuela
64 photos

Autres
60 photos

RedBull Vertigo
Festival
68 photos

© allezbase.com
Tous droits réservés

La plus belle ville
du monde
Un saut capital...

31 décembre 21h
Un nouvel an pas
comme les autres...


Maroc 2004
Ouverture de spots au
Maroc par Mika et Nico

Téléchargez
3 fonds d'écran
1024/800 pixels






Photo de fond :
Sean
Voir l'original
 
 
 
 
 
 
 
 



Je hais cette ville.


Son univers de béton, ses habitants pressés, malpolis, presque inhumains.
Quelques années passées à y travailler m'ont appris à la détester. Pour le reste de l'univers, c'est la plus belle ville du monde, notre beau pays n'est que cette ville sans rien d'intéressant autour. Pouah.


Cliquez sur les photos pour les agrandir !

   
En la quittant enfin pour d'autres horizons, je m'étais juré de ne jamais y remettre les pieds... Mais c'était "avant"... Je suis à présent bien décidé à en goûter les charmes. Pas de ceux qu'on découvre en rôdant dans d'autres quartiers, mais de la belle verticalité artificielle que l'on trouve à certains endroits.
   
Il y a quelques mois, Hervé m'a fait le plaisir de m'emmener "visiter" ce que certains appellent affectueusement "La Grande Dame de Fer". Après ce saut mythique, nous sommes allés avec Marco tenter notre chance à un autre endroit, tout aussi majestueux : "La Grande Dame Noire" est son surnom, et elle est bien défendue : vigiles nombreux, alarmes à faisceaux infrarouges, barrière de 3m de haut hérissée de piques acérées... Un lacet emmêlé dans cette dernière nous a finalement valu une interception du vigile de service, et une redescente à pieds peu satisfaisante. 
   
Nous y revoilà, Hervé et moi, lacets soigneusement rangés cette fois-ci. Le vent est calme, le grand parvis servant de posé est désert.
" Bon, on va y aller ? "
Comme à mon habitude pour ce genre de saut, je suis mort de trouille. L'illégalité me met une grosse boule dans l'estomac, pourtant j'ai la conscience tranquille ! Après tout je ne fais que voler un peu de hauteur...
Et comme à son habitude, Hervé est complètement zen, ce qui m'angoisse encore plus !
  
   
 Allez, c'est parti. Je m'avance vers l'entrée, Hervé fera de même 10 mn plus tard. Je prends mon ticket pour la visite panoramique et vais vers l'ascenseur, en cherchant à ma joindre à quelques touristes pour tenter de passer plus ou moins incognito. Je ne suis qu'un touriste moi aussi !
Devant l'ascenseur, il y a un vigile qui contrôle les tickets. Tiens, c'est le même qui nous a intercepté quelques mois auparavant ! Ca commence bien...
 
 



 
Les personnes qui me précèdent montent dans l'ascenseur, je leur emboîte le pas. Mais le vigile m'arrête : " Non monsieur, pas vous ! " Mon coeur battait déjà fort, et il fait un gros bond. J'ouvre la bouche pour essayer d'articuler quelque chose, mais rien ne sort, j'écarte les mains en signe d'innocence... Dans une de mes mains, il y a mon ticket pour l'ascenseur, le vigile le voit et me fait signe de monter : il croyait juste que je voulais passer sans ticket !
Première alerte, premier soulagement.
De courte durée.
  
   
Je m'installe dans l'ascenseur au milieu des touristes, immédiatement le vigile me dit : " Qu'est-ce que vous avez dans votre sac ? "
- " Heu... Un harnais d'escalade, je viens de l'acheter... "
- " Faites voir ! "
  
   
Certainement cramoisi jusqu'aux oreilles, je commence à enlever les bretelles de mon sac. Comme l'ascenseur est plein, ça m'oblige à pousser un peu mes voisins, évidemment ça ne leur plaît pas. Voyant ça, le vigile me dit : " C'est bon, ça va ! ", et reste en dehors de l'ascenseur, laissant les portes se fermer.
Deuxième alerte, deuxième soulagement.
De très courte durée.
 
   
  Avant que les portes ne se ferment complètement, je vois le vigile décrocher un téléphone sur le mur. A présent, je sais que quand les portes s'ouvriront à nouveau, un autre vigile m'attendra...
Pendant les quelques instants que dure la montée, j'essaye de retrouver mon calme et d'avoir l'air détendu. Impossible, évidemment.
Les portes s'ouvrent, les touristes sortent de l'ascenseur et moi aussi. Nous voici arrivés à l'étage panoramique orné d'une baie vitrée à 360°. Pour y accéder, tout le monde passe devant un autre vigile à la sortie de l'ascenseur.
   
Ca ne rate pas, il me demande ce qu'il y a dans mon sac. C'est là que j'ai une idée lumineuse pour reprendre le dessus et ne pas subir la confrontation :
- " C'est un harnais d'escalade, je l'ai déja dit à votre collègue en bas.
Mais si c'est un problème, je peux vous le laisser le sac ! "
(devant tant de bonne foi, le vigile me laissera certainement passer...)
- " Oui, laissez-moi votre sac, merci... "

Et meeeerde ! Me voilà propre.
   
 Sans broncher, je dépose mon sac aux pieds du vigile et m'avance nonchalemment vers les fenêtres, comme un bon touriste qui vient de satisfaire à un contrôle de sécurité anodin en ayant la conscience tranquille, et qui va profiter de la visite.
Mais si le vigile entendait les battements de mon coeur à cet instant, il se couvrirait les oreilles tellement ils font du bruit... D'ailleurs il doit les entendre, car arrivé à un coin de la baie vitrée, je me retourne et le vois qui me regarde d'un oeil soupçonneux...
   
 

Il est temps d'informer mon compère des beaux draps dans lesquels je suis.
- " Allô Hervé ? Bon c'est la merde : je suis en haut mais je me suis fait questionner et j'ai dû laisser mon sac à un vigile ! "
- " Heu... Tu penses pouvoir le récupérer et sauter ? "
- " Mmm... J'y réfléchis et je te rappelle ! "
- " OK, en attendant je reste en bas, inutile d'essayer de monter si je suis sûr de me faire choper ! "

 
   
Me voilà seul.


La solitude, dans le contexte du base, m'a toujours fasciné de part ses multiples facettes : on est toujours seul à tirer la poignée, seul à faire face à une malfonction, seul à manoeuvrer la voile sur un posé délicat... Même si on est entouré de sauteurs ou de spectateurs.
   
Ici, malgré la présence rassurante d'Hervé au téléphone et les nombreux touristes au même étage que moi, je me sens complètement seul. Sentiment souvent exaltant, mais à cet instant précis, angoissant, presque désespérant.

Comment vais-je me sortir de ce mauvais pas ? Comment récupérer mon sac et sauter ? Au bout de quelques instants, une solution possible se profile dans mon esprit. Risquée, mais faisable. Et ça devient vraiment un saut de brigand…

  
   
 Suis-je vraiment " taillé " pour ce genre de saut ? 
   

Avec cette dernière question, d'autres m'assaillent : n'ai-je pas tort de vouloir tenter ce saut de cette manière ? N'est-il pas préférable de sauter dans le cadre d'évènements légaux, fades mais tranquilles ?

Une fraction de seconde passe, puis la réponse fuse dans mon esprit, elle est claire, nette, sans appel. Non. Je ferai ce saut en pirate ou ne le ferai pas, c'est ma manière de le mériter. Ai-je raison, ai-je tort ? Peu importe, l'essentiel n'est-il pas d'écouter son instinct ?

 

   

 

Allez, lopette. En avant. Remettre la main sur mon sac, et puis…

Mais où est-il, mon sac ? Plus là où le vigile l'avait laissé en tout cas… Je demande à un autre vigile : " Ah, il faut voir ça avec le gérant, le sac est dans son bureau ! "
Aïe, ça se corse. Le gérant, c'est le grand là-bas, en costard. Va pas être facile à embobiner, celui-là, déjà que j'y arrive pas avec les autres…

 
   
 - " Bonjour, je voudrais récupérer mon sac que j'avais laissé, s'il vous plaît… "
- " Oui, c'est quoi comme sac ?"
- " Heu, bin, un gros sac, bleu marine… "
- " Aaaaah, d'accord, je vois. Et il y a quoi dans ce sac ? "
- " Heuuu, un harnais d'escalade… "
- " Aaaaah bon. On me l'a présenté comme étant un parachute ? "
   
 Gling.
Le fusible saute, arrêt du cœur. Une blonde aux attributs avantageux va-t-elle sortir du néant pour me ranimer ? Non, sûrement pas.
Réagis, bon sang !
 
   
 - " Heu, je n'ai ouvert mon sac à aucun moment, comment on a pu vous dire ça ? "
- " Bon, venez dans mon bureau, vous allez l'ouvrir et me montrer ça ! "
 
   
On ne peut pas dire que ça s'arrange. Me voilà dans le bureau du gérant. J'ouvre le sac d'une main tremblante et bafouille une description de mon " harnais rembourré ". Le gérant plonge une main dans le sac, et saisit mon piège par le côté. Il tâte le " rembourrage ". Quelques secondes se passent, interminables. Nous sommes tous les deux penchés sur mon sac. Si je lève la tête, si je croise son regard, là c'est fini, je suis fait. Ce matin, j'étais préparé moralement à me faire confisquer mon matos : ce qui va m'arriver est pire, je vais me le faire confisquer sans même avoir sauté !  
   
Quand soudain IL intervient... C'est sûr, maintenant je sais qu'IL existe...

Ce miracle ne peut être le fait que du dieu du base : le téléphone du gérant sonne !
 
   
 - " Allo ? "
- " … "
- " Des journalistes de M6 ? Non, je veux pas les voir ! "
- " … "
- " Non, écoute, j'ai déjà vu ceux de TF1 tout à l'heure, j'ai rien à leur dire ! "
 
   
Apparemment l'affaire est d'importance, il a l'air en colère. Peut-être est-ce ma chance ?
Je manifeste une certaine envie de m'en aller, peut-être va-t-il me laisser partir ? Il jette un coup d'œil de mon côté… Et dit au téléphone :
- " Je suis occupé, là, tu peux me rappeler dans 5 minutes ? "
Et merde, raté, il va me finir tranquillement.
Mais son interlocuteur ne le lâche pas, ça doit vraiment être grave cette affaire ! Ca dure encore quelques instants, et je manifeste à nouveau quelques signes d'impatience… Il me rejette un coup d'œil…
- " Quitte pas une minute ! " Et se tourne vers moi en me tendant la main…
- " Bon, monsieur, au plaisir, allez-y. "
  
   
Je bafouille quelque chose pour exprimer mon soutien vis-à-vis de son problème.
Il me regarde bizarrement. J'en ai peut-être trop fait, là !
Non, c'est bon, il me laisse partir.
 
   

J'empoigne mon sac et je sors du bureau. Personne sur ma droite, vigile un peu plus loin mais il me tourne le dos. Hop, je monte dans l'escalier. Piège sur le dos, barrière, je suis au bord du vide. L'alarme s'est déclenchée et le vigile (toujours le même que la dernière fois !) m'interpelle : " Monsieur, sautez pas, ils vont me virer… " Coup bas, mais je l'ai prévu. Je sors mon téléphone. Je vais prendre son numéro, je l'appellerai après le saut pour m'assurer que tout va bien pour lui. Si besoin j'irai m'expliquer. Mais il a déjà fait volte-face et rentre à l'intérieur du bâtiment.

Bon, il n'y a plus qu'une chose à faire, celle pour laquelle je suis venu !

Un coup d'œil en arrière. Les touristes se pressent sur la terrasse, caméras et appareils photos braqués. Moi qui n'aime pas trop qu'on me regarde, je suis servi !

 
   
 

Une bonne expiration. Allez BASE ! Départ en courant sur le coin de l'immeuble.

Le visuel est foudroyant. La grande face noire en forme de V aplati défile sous moi, les fenêtres brillent. Quelques secondes d'éternité.

Une, deux, trois… Il est temps de mettre fin à ce bonheur. La voile s'ouvre doucement, dans l'axe. Tiens, y a du vent de travers qui s'est levé depuis tout à l'heure, c'est vrai qu'il s'est passé un bout de temps !

   

Posé, échappatoire. Les vigiles qui ont accouru au pied du parvis dès mon posé ont curieusement fait demi-tour, et ne réapparaissent que quand je suis bien à l'abri. Un miracle de plus.

Je retrouve Hervé en bas. Un regard échangé suffit à exprimer ce que je ressens. Rien ne sert de parler, d'expliquer, il a déjà vécu bien des fois ce qui vient d'être une émotion unique pour moi.

  
   
Je n'aimerai jamais cette ville…

Mais aujourd'hui, là je suis d'accord, c'est vraiment la plus belle du monde !!!