Maroc 2004 Le Maroc est une destination privilégiée des grimpeurs lhiver, notamment le massif du Todra. En revanche, peu dentre eux connaissent les itinéraires gazeux et terrains daventure des gorges de Taghia. Sur ces falaises rouges, situées entre 1800m et 2900m daltitude, il nest pas rare de trouver de larges vires neigeuses entretenues par des précipitations régulières jusquau mois de mai. Le sol est caillouteux à 90%. | ||||||||||||||||||||||||||||||||||
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Seul
le fond des vallées retient un peu la terre. Les maigres cultures dorge
verdoyantes au bord desquelles se bâtissent des maisons de terre sechée, laissent difficilement croire que la vie est possible ici. Malgré une faible densité humaine, et contrairement à ce que lon pourrait croire, la « surpopulation » pose déjà problème : chaque lopin est exploité. Il ny a dailleurs presque plus de bois dans les montagnes. Les maisons nétant pas chauffées, même à 10°C en hiver, on ne peut difficilement parler dabus ! Malgré cela, quand un groupe détrangers vient à passer dans le petit village, comme nous, des souches de genévriers centenaires sont brûlées dans le petit Haman. Quelle hospitalité ! Cliquez sur les photos pour les agrandir, lorsqu'elles sont signalées comme suit : >>>>> | ||||||||||||||||||||||||||||||||||
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Parmis
les grimpeurs enthousiastes de ce pays, Philippe lAuvergnat vient 2 à 3 fois par an. Je me rappelle bien lorsquil me montrait les photos. « Le rocher fait 700m par endroits, les voies sont difficiles, et je ne pourrais pas dire si ça saute, mais cest raide en tout cas ». Confirmation dun autre ami grimpeur qui mexplique en détail les topos descalade. Les photos sont toutes prises de face. Difficile de se faire une idée de la raideur et de ce quil y a au pied. Il faut donc aller voir ! Nous partons avec Nico en équipe réduite (2 personnes !). Au moins si ça ne saute pas, nous naurons de compte à rendre quà nous mêmes ! | ||||||||||||||||||||||||||||||||||
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Marrakech
18h. On a bien changé 3 fois davion, et nos bagages suivent,
« théoriquement ». Je regarde anxieusement, le tapis tourner. Pourquoi le sac rouge ne vient-il pas ? « Parcequil sest perdu dans un aéroport », on nous dit Cruelle déception! 150m de corde, la trousse à spit, les baudriers, le marteau, les sangles De quoi équiper presque nimporte quel exit récalcitrant Nos vacances tombent à leau dès le 1er jour ! Je suis triste. À laéroport, ils servent des bières Alors, je men prends deux directement. Plutôt que se laisser aller, Nico lui, sort de ses poches dépaisses tranches de jambon et rogne. Notre guide Marocain hallucine : « Bières ! ? Khallouf ! ? ». Ces maudits Français ne respectent rien ! Après 6h dattente, le sac rouge est retrouvé. Bénédiction ! Quelques heures de taxi et de 4*4 plus tard, nous permettent de nous alléger dune partie de nos billets. Le guide, les chauffeurs sont très contents, et se répartissent les dirhams allègrement. On y comprend rien mais peu importe. Nous faisons le reste à pied, et nos bagages à dos de mule. Il ny a pas de pistes qui montent à Taghia. Notre objectif de laprès-midi est de taper des rappels depuis la crête sommitale de la « Queue du Vautour ». Des Espagnols ont ouvert en 1997 une voie de 700m en 7b/A3 dans une zone surplombante, mais à notre surprise et vu du pied, ça na pas lair si déversant que ça Quelques heures de marche nous font prendre conscience de la précarité des chemins : les passages sont raides, parfois déversants, aménagés de branches coincées dans des fissures sur lesquelles reposent de grosses pierres plates. On se croirait dans « Himalaya », lorsque le Yak tombe dans le ravin Quant à moi je suis bien content dêtre grimpeur Et quand je peux, je ne manque pas de dramatiser la situation, ça fait encore plus râler Nico! | ||||||||||||||||||||||||||||||||||
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Après
lépique traversée du canyon, nous remontons des gradins rouges
sur presque 1200m de dénivelée et nous prenons pied sur la crête. Du sommet, le pilier se voit facilement. Je tire 50m de rappel sur la corde statique. Le descendeur stop spéléo tout neuf est vraiment bien pour équiper. Avec de la 9mm, je fractionne régulièrement pour éviter les frottements, car il faudra remonter, nous navons pas pris les parachutes pour le repérage. Le terrain présente beaucoup de becquets et darbustes autour desquels je mets mes sangles. Arrivé à lexit, nous lançons des pierres. Elles tapent toutes sur un gros ventre à 5s. Elles le frôlent avec 10m de projection. Avec un départ en courant ce serait bien, mais le terrain est peu propice, le sommet du pilier étant constitué de blocs instables. | ||||||||||||||||||||||||||||||||||
Je
regarde lensemble de la face. Laspect général est bien
trop positif, hormis les 300 derniers mètres à droite, qui plongent dans un canyon étroit. La voie Espagnole sans doute. Cest trompeur ce rocher orange partout. Le calcaire en Europe nest pas pareil Lorange indique généralement du dévers Décevant aussi lOujdad vu de profil : il ny aurait apparament que 200m de vertical dans cette face de 600m Lescalade y est paraît-il splendide. Nous attaquons la descente par le passage du Tire-bouchon, presque à la nuit. A côté de cette via-ferrata berbère, la paroi de la cascade, lisse et bien orange, a lair sautable. Nous verrons demain. De retour au gîte de Said, le hamam de bienvenue nous attend, ainsi que des frites et du Tajin « bio » délicieux. Le lendemain nous partons au lever du soleil, nous voulons avoir le temps de faire les repérages en évitant les thermiques et la brise de vallée. Nous prenons également nos parachutes et 20m de sangle. Lexit de la cascade nest pas dur à trouver, il suffit daller au sommet de la colline et de se pencher. Les pierres tapent agréablement à 8 secondes dans le pierrier en contrebas. | ||||||||||||||||||||||||||||||||||
Enfin un bon dévers ! Ca va sauter! On est tout contents et bien fébriles. Je saute en premier : 2 pas, et le mur défile, ça fait plaisir ! Un petit bombé revient à la fin. Je choisis de tirer juste après, à 5s. Le 38 tire bien, mais je prends un 90° et une grosse abattée à louverture. Parfois cest bien de pas être trop bas ! Nico saute après, nickel. 700m de déniv sous voile nous amènent au village où nous survolons les maisons. | ||||||||||||||||||||||||||||||||||
Des
cohortes denfants courent à notre rencontre en dévalant les
collines, les gens sortent de leurs maisons, lair un peu étonnés : « Palachoute ? Palachoute ? ». La nouvelle se répand vite dans le village. Au gîte, cest un défilé permanent : instituteur, paysans, muletiers tous veulent savoir ce qui se passe. Nous aurons loccasion de sauter 3 fois de la cascade. Les enfants nous attendront systématiquement au bord de la rivière, à tel point quil est parfois difficile de se poser ! Ils sont rigolos, jai jamais vu une telle coordination. Ils bondissent de pierres en pierres instinctivement au milieu du torrent. Nous on est vraiment nuls ! Leur instit parle bien Français. Il leur a demandé demmener leur livre pour communiquer avec nous. Mais ça va mieux simplement avec des gestes ! Les jours suivants, le Taoujdad et le Tadrarte savèrent peu engageants. Dommage pour ce dernier, mais ce serait un coup à taper le mur den face en dérive La moindre orientation à louverture laisserait peu de temps, ça nen vaut pas la peine. Nous avions repéré sur la piste qui mène à Zaouiat, une barre rocheuse au sommet dune colline. Au moins 350m, sûr, un surplomb énorme ! | ||||||||||||||||||||||||||||||||||
Nous
dormons le soir chez lhabitant, dans une pièce sombre recouverte de tapis. Sympa, le chef de famille nous fait le thé à la menthe sur des charbons ardents. Il est vachement fier La seule chose qui nous gêne un peu, cest lépaisse couche de poussière déposée sur les tapis. Ça a pas été aéré depuis 50ans, cest sûr! On bouge donc le moins possible pour ne rien remuer. Nico sisole même sur sa bâche de pliage A un moment donné, on était tous dans nos duvets prêts à dormir, et je pense que le chef de famille a voulu se préparer son lit bien à plat. Cest tout naturellement quil prit un tapis et le secoua énergiquement au travers de la pièce ! Dommage Il neigeait de la poussière ! ! ! Au chant du coq, on a des croûtes plein les narines ( ). Enfin bon, nous avions dit que nous nous débrouillerions pour déjeuner, mais au lever tout était prêt sur la table. Ils ont dû se lever à 4h du mat pour faire le pain, incroyable cette hospitalité, quand même Pour le surplomb de Tifwina, la marche dapproche se résume en un bon « tout droit dans la pente », juste sous la falaise. Phénomène curieux, plus on sapproche, plus elle paraît petite. Vue du pied elle semble faire 150m ! On pense déjà à chercher des coins dherbe pour descendre le glisseur. Sans pinces et avec la Fox en ZP, ça va être sportif ! Un immense plateau rouge nous attend au sommet. A perte de vue, aucune végétation. Langle de la falaise est bien marqué. En bordure du plateau, des dalles bien plates invitent à un éventuel départ au sprint. Dautant que les pierres tapent à 7,2s. Nous sommes contents, nous ne replierons pas. Tout est superbe, le désert rouge au sommet, la falaise, la vue... Le seul gros stress de la journée, cest après avoir jeté la première pierre : Des bergers étaient paisiblement assis au pied... Sans que nous ayons pu les voir. Au Maroc, il y a des gens partout. Dans les arbres et sous les arbres, qui ramassent du bois, qui promènent les chèvres même dans les coins les plus perdus | ||||||||||||||||||||||||||||||||||
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Le
saut est chouette, cela fait très exotique dans cet endroit, on se croirait
en Australie. Nous survolons quelques maisons perdues dans la vallée et pensons à notre guide, qui va se taper les 1000m de descente à pied. Dur ! Au fait, aujourdhui jai appris pourquoi Nico court aussi fort que Ben Johnson à lexit. Sil veut être loin, cest quil se prend des 180°-Twists à louverture Cap vers la Cathédrale ! Ce Monolithe de presque 600m a été nommé comme cela il y a longtemps par les Français. Il faut dire que cela ne ressemble à rien dautre. Le rocher orange est une sorte de pudding Riglossien sculpté par leau. Assez irrégulier dans la raideur. Il y a des dentelles partout, des vires érodées, des méduses. La flèche doit faire 250m de haut, assez raide, et le corps 300m, positif en apparence. Nous décidons de partir le 1er jour avec le matériel déquipement seulement. Nous ny croyons guère, car même en regardant les photos sous tous les angles, cela ne semble pas assez raide. Lapproche est courte (1h30). Le chemin, aérien, passe de vire en vire sur un versant, puis sur lautre, pour se terminer par une petite chattière et un pas dopposition dans une diaclase. Le sommet ressemble à une grosse carapace de tortue. Sympa. Plus on sapproche, plus ça sent le vide, mais on nose y croire. Rappel sur une vire, puis sur une 2ème en contrebas : cest raide ! Les premières pierres jetées disparaissent derrière un petit bombé et tapent à 8s. Plus quil nen faut ! Jessaye de lancer en éventail, et à différentes distances, mais les rafales de vent mempêchent de bien entendre. Je nai confirmation du saut que dans un axe. Je prends donc bien le repère. Demain, il faudra pousser fort pour éviter les mauvaises surprises. Nico choisit un départ en courant 5m au-dessus de la vire supérieure. Nous ne sommes pas daccord là-dessus et on braille ! Cest à qui veut avoir raison. Son exit lui fait perdre un peu de distance en longueur, mais il est plus propice à la course. | ||||||||||||||||||||||||||||||||||
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Le
soir tombe, je cherche dautres exits le long de la vire. Je nai pas
envie davoir à remonter tout le matériel un autre jour. À
50m, je trouve un autre départ. La pierre tape à 9 secondes avec
visuel cette fois-ci. Cool cet exit N°2, un vrai plongeoir sur 10m! Le lendemain on est prêt sur lexit N°1. Nico part en courant de son exit, moi du mien 5m en contrebas. Cest convenu, comme on ne se voit pas, à « BASE » on saute en même temps. Je suis un peu anxieux par ce manque de visu au départ Je fais 4 pas en arrière et revérifie une dernière fois laxe. 3,2,1, BASE ! Je pousse de toutes mes forces. Tout de suite je regarde en bas. Le caillou est près. De fines draperies reviennent à gauche et à droite. Je suis dans une grosse rigole. Un becquet rocheux arrive vers moi à 4s. Cest sur celui-ci que les pierres tapaient quand je les lançais hier, à ras du caillou. Cest langoisse mais ça passe. Dessous tout se dégage dans un gros toit : cest le « nid daigle », bien connu des habitants de la région. Un couple de rapaces y niche chaque année. A 5-6s, la dérive est efficace, une rampe oblique monte, mais sefface vite en dérive. Quel soulagement ! Je tire et je constate avec satisfaction que Nico est là. Il était derrière moi pendant toute la chute lanimal ! Sa vidéo embarquée me montre presque « loin » du caillou par rapport à lui. Euh, finalement lexit N°1 est bien, mais on va aller voir le N°2 ! | ||||||||||||||||||||||||||||||||||
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Les
jours suivants se déroulent sur lexit N°2, très serein.
On a la chance de faire presque 2 sauts par jours pendant 4 jours. La face est
orientée NE, lidéal. On apprécie la hauteur et le visuel..
Le tenant du gîte apprécie beaucoup ce type de séjour «
sportif ». Le parapente, lescalade, le canoé sont bien pratiqués
dans le coin
ainsi que le BASE
une fois déjà : des Russes
sont venus lan dernier en février, la Cathédrale a été
ouverte en aile ! Argh !
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Supers vacances
quand même, on reviendra avec les copains, le caillou est tellement merveilleux, et puis, jai hâte de remanger du Tajin ! | ||||||||||||||||||||||||||||||||||
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